samedi, février 24, 2007

Saint- Merry


Complainte de Robert le Diable
Tu portais dans ta voix comme un air de Nerval
Quand tu parlais du sang, jeune homme singulier
Scandant la cruauté de tes vers réguliers
Le rire desc bouchers t'escortait dans les Halles
(...)
Tu parcourais la vie avec des yeux royaux
Quand je t'ai rencontré revenant du Maroc
C'était un temps maudit peuplé de gens baroques
Qui jouaient dans la brume à des jeux déloyaux

Debout sous un porche avec un cornet de frites
Te voilà par mauvais temps près de Saint-Merry
Dévisageant le monde avec effronterie
De ton regard pareil à celui d'Amphitrite
(...)
Je pense à toi Desnos qui partit de Compiègne
Comme un soir en dormant tu nous en fis récit
Accomplir jusqu'au bout ta propre prophétie
Là-bas où le destin de notre siècle saigne
Je pense à toi Desnos et je revois tes yeux
Qu'explique seulement l'avenir qu'ils reflètent
Sans cela d'où pourrait leur venir ô poète
Ce bleu qu'ils ont en eux et qui dément les cieux


Aragon Il ne m'est Paris que d'Elsaf

ut publié dans le recueil les Poètes,1960, Gallimard

Dubuffet,un voyage en métro la connaissance de Paris par son sous-sol,avec renouvellement complet de tous les personnages à chaque station,...

la vie extérieure, Annie Ernaux(1993-1999) Extraits Folio p.44, 48,50

"1994
18 mars
Dans le haut de l'escalator, aux Halles, un homme faisait la manche.Il avait laissé sortir de son pantalon, coupé aux genoux , les moignons de ses jambes amputées .On aurait dit les extrémités de deux énormes sexes .

A la station Montparnasse,un accordéon invisible jouait Il est revenu le temps du muguet puis l'air des parapluies de Cherbourg. Au détour d'un couloir,une escouade de contrôleurs en uniforme brun,quatre ou cinq en rang le long du mur et quatre autres , entourait et questionnait âprement un homme .Celui-ci était jeune, la peau foncée , les cheveux en catogan. Sentiment accablant de l'ordre des choses .5 mai
Dans un couloir de la station Bastille,ces mots en énormes caractères,à la craie sur le sol:A MANGER. Un peu plus loin, de la même façon :MERCI.Plus loin encore, agenouillé en plein milieu du couloir,l'homme qui a écrit cela, un gobelet au bout de sa main tendue .Le flot des gens s'écarte en deux branches devant lui. J'étais dans celle de droite .

26 mai
Sur les panneaux publicitaires est réapparue cette belle femme au visage grave,cheveux lisses en chignon bas, qui dévoile complètement un sein comme si elle s'apprêtait à allaiter. Mais le sein un peu affaissé est celui d'une femme mûre et il est atteint d'un cancer.Le regard de la femme croise celui des autres femmes partout, dans le métro, dans les rues .

Relever un jour toutes les affiches collées sur les murs de plusieurs stations de métro, avec leurs slogans .pour fixer exactement la réalité imaginaire, peurs et désirs du moment .Les signes de l'histoire présente que la mémoire ne retient pas-ou juge indigne d'être retenus "

André Breton

(Photo :centre G .Pompidou)
"L'atelier de la rue Fontaine, où le tableau de Chirico, le cerveau de l'enfant (1913) a longtemps dominé la mise en scène d'une formidable collection d'objets magiques,venus de tous les horizons "(le Monde, 25 avril 1991)

(...)"Des masques mexicains, des objets océaniens,des poupées hopi,des sculptures esquimeau..) Marguerite Bonnet , André breton, naissance de l'aventure surréaliste (1988)José Corti

"Un masque conique, en moelle de sureau rouge , de Nouvelle-Bretagne l'a fait s'écrier:"Tiens, Chimène !", une petite statue de cacique assis lui est apparue plus menaçante que les autres (...)
Un autre fétiche dont je me suis défait était pour elle le dieu de la médisance;un autre, de l'île de Pâques ,qui est le premier objet sauvage que j'aie possédé, lui disait:"je t'aime, je t'aime"
André Breton, Nadja,(1928)Livre de Poche p.77

"Tu marches vers Auteuil tu veux aller chez toi à pied
Dormir parmi tes fétiches d'Océanie et de Guinée "(...)
Apollinaire, Zone, Alcools(1911)

Fontaine Stravinsky




fontaine Stavinsky
"Actuellementje travaille à une fontaine dont l'élaboration relève quasiment du magique.Boulez voulait qu'on aménage un peu son terrain de foot, au-dessus de l'IRCAM, souterrain à l'ombre du gigantesque bateau de Beaubourg, l'une des mervailles du monde (...)
donc, en tout début de construction,un ilgénieur collaborateur et compagnon, découvre un poème de Desnos qui me laisse foudroyé d'étonnement. Le voici:

La Prophétie

D'une place de Paris jaillira une si claire fontaine
Que les sangs des vierges et les ruisseaux des glaciers
Près d'elle paraîtront opaques .
Les étoiles sortiront en essaim de leurs ruches lointaines ,
Et s'aggloméreront pour se mirer dans les eaux près de
La Tour Saint-Jacques

D'une place de Paris jaillira une si claire fontaine
Qu'on viendra s'y baigner , en cachette, dès l'aurore
Sainte Opportune et ses lavandières seront ses marraines
Et ses eaux couleront vers le sud venant du nord .

Un grand marronnier rouge fleurit à la place
Où coulera la fontaine future
Peut-être dans mon grand âge
Entendrai-je son murmure !

Or le chant est si doux de la claire fontaine
Qu'il baigne déjà mes yeux et mon coeur.
Ce sera le plus bel affluent de la Seine
Le gage le plus sûr des printemps à venir,
De leurs oiseaux et de leurs fleurs .
Robert Desnos, Contrée, Gallimard
in TingTing Tinguely, texte établi par J.N.Von der Weid
le monde de la musique
mars 1963
DACVP-CDARC

Atelier Brancusi


Tendres mirages (2)

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